Communiqué de presse de l’exposition galerie Bernard Jordan, 2013

Une Oeuvre
« Ma peinture est comme une généalogie désorganisée de l’histoire de l’art, je ne démarre rien, je ne fais que recevoir. »
Alain Sicard trouve sa force créatrice en côtoyant les oeuvres qui ont forgé l’histoire de l’art. Perpétuellement à la recherche de sensations esthétiques, il parcourt les musées et les livres d’art en collectant les détails, lumières, constructions et couleurs des oeuvres de ses pères, toutes écoles et époques confondues.
Pour faire perdurer sa mémoire de la peinture, il récolte tous types de reproductions attachées aux oeuvres qui l’ont marqué dans ses visites. Cartes postales et livres d’art se côtoient dans son atelier sur une étagère ordonnée et renouvelée selon ses découvertes. Ainsi se forme une palette de couleurs, de touches et de formes, attachée à la peinture, la sculpture, l’architecture ou encore au vitrail distinguable ici ou là dans son oeuvre.
A l’origine de sa pratique, Alain Sicard travaillait la peinture à l’huile sur papier couché. Depuis trois ans, il expérimente le klöckner, support synthétique doté d’une remarquable stabilité hygrométrique et qui lui permet la plus grande créativité tout en gardant la planéité qu’il recherche dans ses peintures. Alain Sicard cherchait autrefois à garder cette finesse pour s’apparenter à la texture de la photographie en la citant même à travers l’utilisation de cadres et de vernis colorés. Aujourd’hui, il s’émancipe de cette référence en présentant l’hégémonie de la peinture. A travers la spontanéité de son geste, la diversité de ses touches, les palettes chromatiques et les nombreuses constructions spatiales de ses oeuvres, il a su créer en plus de son style, une encyclopédie de la peinture, qu’artistes, néophytes et passionnés de ce média peuvent reconnaître et apprécier.
Un protocole
Alain Sicard, travaille ses supports sans images préconçues. D’abord, sur le support blanc il appose des touches de couleurs directement sorties du tube, ensuite il asperge l’oeuvre de solvant, pour développer la matière sur l’ensemble de la surface. Expériences qu’il renouvelle plusieurs fois, jusqu’à ce qu’une ligne de conduite lui apparaisse. A chaque tentative l’artiste pose son instrument et se met en position de spectateur pour ressentir la naissance de la peinture et la réminiscence d’une image.
Autrefois réalisées à plat, ses peintures, une fois exposées à la verticale, lui semblaient en décalage avec l’élaboration et la perception du travail au cours de la séance. Depuis un an, il choisit de travailler à la verticale, pour que l’oeuvre en situation d’exposition soit pleinement fidèle à sa vision en atelier.
Une exposition
Ses peintures, suscitées par la documentation et la collection, révèlent plus qu’une image, la réminiscence de sensations à travers les ambiances, touches ou détails d’oeuvres connues, mais soudain inidentifiable.
Sa peinture très gestuelle, abstraite peut aussi être qualifiée de peinture d’impression. En construisant et déconstruisant de multiples images, il se joue de notre « musée mental ». En effet, inconsciemment et communément à tout regardeur de peinture, notre corps emmagasine dans un répertoire les sensations données par chaque nouveau tableau. Alain Sicard se joue de nous en nous présentant s(c)es formes, s(c)es touches, s(c)es couleurs que nous connaissons, sans jamais nous en donner la clé, car même lui n’en connaît plus directement la citation.

Lucile Hitier